Actuellement 1 français sur 5 assume le rôle de personne proche aidante, et ce nombre continuera d’augmenter. Bien que nous soyons d’avis que l’accessibilité aux soins et services à domicile doit être grandement améliorée, la question prégnante qu’il convient de se poser est :

– Est-ce que les nouvelles générations sont prêtes à donner de leurs temps pour venir en aide à un proche ?

C’est cet enjeu de société qu’il nous apparaît important de porter, soit le besoin pour la population de conduire une réflexion individuelle, une discussion ouverte dans notre entourage (famille et amis) ainsi qu’une conversation collective (y compris dans nos milieux de travail et à l’école) quant au rôle des personnes en situation d’aidance.

Rappelant le proverbe « On traversera le pont une fois rendu à la rivière », les personnes proches aidantes acceptent souvent ce rôle avant de savoir ce que cela signifie ou implique. Nous croyons qu’il faut plutôt s’y préparer bien avant de devoir agir comme personne proche aidante, afin de pouvoir vivre cette expérience de façon cohérente et resiliente avec nos valeurs et capacités, ainsi que pour recenser nos besoins de soutien évolutifs et étroitement liés à l’état de santé de la personne aidée.

Si notre société veut privilégier le maintien à domicile des personnes âgées ainsi que le décès à domicile, on ne peut se permettre d’attendre plus longtemps avant d’entreprendre une telle réflexion.

Les professionnels intervenant à domicile et les services sociaux par leur proximité avec les personnes vivant des problèmes de santé et leurs proches, leurs connaissances quant à l’évolution de ces problèmes et des soins qui y sont associés, doivent être les acteurs permettant de sensibiliser à l’importance de ces discussions.

Les incidences de la proche aidance, qu’ils soient positifs ou négatifs sur les plans personnel, familial, social ou économique, doivent être compris afin de réfléchir de façon éclairée sur notre préparation et notre volonté pour assumer ce rôle, qui peut prendre différentes formes. Réfléchir à ces impacts doit également nous amener à réfléchir aux facteurs qui influent sur cette expérience. Comme future personne proche aidante, quelles activités voudrez-vous effectuer ? Un accompagnement aux rendez-vous ou faire des courses ne requiert pas le même engagement que de prendre soin d’une personne vivant avec des troubles cognitifs requérant une présence 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.

Aurez-vous les capacités ou la volonté de naviguer dans le système de santé et des services sociaux ? De plus, plusieurs facteurs qui influent sur la proche aidance doivent être considérés, par exemple, notre contexte de vie, ce qui comprend notre situation et notre dynamique familiale et amicale, notre statut socioéconomique, notre éducation, notre emploi, etc.

Sommes-nous prêts à revoir notre système de santé au profit des plus âgés ou des plus vulnérables ? Si oui, dans un contexte de pénurie de professionnels, il faudra soutenir les jeunes désireux d’embrasser des carrières dans les soins. Sans cet engagement, nous subirons à terme les conséquences de cette absence de réflexion et d’engagement à revoir les ressources à la disposition des proches et des personnes âgées.

Selon nous, il est également important de poser les questions suivantes : quelles sont les attentes de nos aînés envers le soutien à recevoir de leurs proches ? Quelles sont les volontés de nos conjoints, frères, sœurs, enfants, petits-enfants ou amis à tenir le rôle de personne proche aidante ? Qu’arrive-t-il lorsqu’il n’y a pas de personne proche aidante ? Ces questions sont essentielles quant à l’avenir de notre société. Il est donc urgent de réfléchir à ce rôle de personne proche aidante et d’en discuter afin de soutenir précocement et adéquatement ces personnes le moment venu, et ce, en conformité avec leurs volontés, leurs attentes et leurs limites.

Puisque nous vieillissons tous, nous avons cette formidable opportunité de repenser notre rapport avec les aidants, notre rapport à nos aînés et au temps qui leur est consacré.