Tandis que les pouvoirs publics tentent d’ériger en modèle “l’approche domiciliaire”, la population française âgée de plus de 85 ans va connaître un accroissement massif, de plus 90%, entre 2030 et 2050, passant de 1,8 million aujourd’hui à 2,6 millions en 2030. Dans un contexte où la prise en soins des seniors et de leurs aidants reste déconsidérer par un système de santé en perte de vitesse et une offre de soins pas toujours lisible pour le grand public.
L’échéance de 2030 approche à grand pas : la France est dos au mur, elle doit adapter de manière historique ses capacités médico-sociales et sanitaires. Nous devons ainsi nous préparer à l’arrivée massive des générations nombreuses du baby boom dans le grand âge à partir de 2030. Face à ce constat, le nombre de structures sera insuffisant.
Depuis des années, les gouvernements successifs vantent le « virage domiciliaire », le maintien le plus longtemps possible des personnes âgées chez elles, pour vieillir mieux dans un environnement familier, susceptible en outre de préserver les liens affectifs. Pourtant, ils hésitent à prendre vraiment ce virage.
Alors que la situation est sous tension : structures saturés, personnels sous-payés et épuisés, au point que le secteur peine à recruter, en institution comme dans l’aide à domicile, multitudes d’intervenants à domicile…
Au-delà des besoins de financement de la dépendance, estimés entre 11 et 25 milliards d’euros à l’horizon 2030, il s’agit d’un choix de société. Les Français souhaitent massivement rester chez eux. D’autant plus que le financement des offres à domicile est moins onéreux pour les comptes publics que des nouvelles autorisations de lits d’ESMS.
Quant à notre système de santé, il est trop binaire entre le domicile et l’entrée en institution. Il faut faire évoluer l’offre afin de limiter les situations de rupture et de pertes de chance.
Entre l’Ehpad (600.000 places) et le domicile existent déjà des solutions alternatives, comme les résidences autonomie (110.000 places) ou les résidences services seniors (50.000). On parle beaucoup d'”Ehpad hors les murs”, ou “Ehpad à domicile” (asphodia-domicile.fr) pour que les personnes même dépendantes puissent rester chez elles tout en bénéficiant de soins, d’accompagnement à la fin de vie, d’aide à la vie quotidienne, etc.
En Nouvelle-Aquitaine, 70 Ehpad ont participé à une expérimentation qui faisaient d’eux des “pôles ressources” dans leur secteur, avec des tournées de nuit auprès de la population âgée, un accueil de jour itinérant, des soutiens aux aidants…
Dans l’Essonne, leliennousanime.fr, partenariat privé/public, est déployé actuellement pour permettre la mutualisation des expertises du territoire. Ce dispositif est appuyé par un groupement “parcours” fédérateur constitué par :
-une plate-forme d’accompagnement et de répit des aidants
-un centre d’information et de coordination pour les +de 60 ans
-une équipe mobile de soins renforcé
-un dispositif de prévention territorial
Le maintien à domicile des seniors implique une prise de conscience des politiques autour d’une nouvelle offre de service à domicile simplifiée, qui s’appuiera sur des pôles gériatriques de proximité, bâtis sur des logiques de parcours et de guichet unique accessible à tous.
Elle s’appuiera aussi sur une politique nationale de prévention de la perte d’autonomie. La Cour des comptes y a consacré un rapport en novembre 2021, pour que les Français qui vivent plus longtemps coulent leurs vieux jours en moins mauvaise santé. L’ampleur de ces défis est évidemment redoutable, c’est précisément pour cette raison qu’il est impératif de s’y préparer dès à présent. Il convient aussi de répondre à l’ambition de la transition démocratique dans le respect des idéaux républicains.