Ils sont entre 9 et 11 millions en France, souvent invisibles, à assumer le rôle discret mais crucial d’aidants. Ce sont des personnes non-professionnelles, bénévoles, qui soutiennent un proche malade ou en perte d’autonomie. Pourtant, ce rôle d’importance peut conduire à une modification de leur mode de vie, à une négligence de leur propre santé et à l’émergence du “syndrome de l’aidant”.

Ce syndrome, souvent méconnu, se manifeste par un épuisement physique et psychologique. Le constat est alarmant : près d’un aidant sur deux subit un impact négatif sur sa vie sociale ou familiale (45%) et sur sa santé (53%) selon une enquête Ipsos réalisée en 2020. Le syndrome de l’aidant est bel et bien réel, et il est temps de le reconnaître.

L’aidant, un rôle aux multiples facettes :

Au fil du temps, l’aidant se transforme souvent en co-soignant, apportant un soutien inestimable au système de soins. Les aidants sont majoritairement des femmes qui fournissent une aide aux activités de la vie quotidienne ou un soutien moral, tandis que les hommes déclarent plutôt apporter un soutien financier.

Cependant, être aidant peut mener à une situation de vulnérabilité. Ils sont souvent prisonniers d’une situation pour laquelle ils n’ont jamais été préparés et se résignent, souvent sans demander de soutien. Par exemple, un jeune aidant peut sacrifier sa jeunesse et son avenir en évitant de parler de sa situation à l’école.

Le syndrome de l’aidant : un mal silencieux :

Alors que l’aide apportée est souvent perçue comme bénéfique, l’extrême dévouement peut s’avérer nuisible. L’épuisement physique et psychologique, la solitude, l’isolement ou la non-reconnaissance de la part de la famille et de la société peuvent mener à des conséquences graves sur la santé de l’aidant.

Ce “syndrome de l’aidant” peut se traduire par du stress chronique, des troubles du sommeil, de la fatigue physique, des problèmes de dos ou des palpitations. Des variations de poids, des troubles digestifs, des signes cutanés ont également été rapportés. L’aidant est parfois lui-même vieillissant ou malade, ce qui le rend encore plus vulnérable.

L’éveil nécessaire : le « réflexe aidants » :

Face à ce constat, la stratégie de mobilisation et de soutien en faveur des aidants 2020-2022 « Agir pour la santé des proches-aidants » préconise l’instauration d’un « réflexe proches aidants ». Ce réflexe vise à offrir à l’aidant vulnérable une consultation médicale spécifique pour faire un point sur sa santé.

Il est également essentiel d’aider l’aidant à se reconnaître. Souvent, un aidant ne se sait pas « aidant » ou rejette ce qualificatif qu’il juge étranger à sa relation avec le proche qu’il aide. C’est pour cela que la communication et la sensibilisation sont des éléments clés pour faire reconnaître l’aidant dans son rôle et lui permettre d’accéder aux soutiens disponibles.

L’instauration de ce “réflexe aidants” ne se limite pas aux professionnels de santé. Il faut aussi impliquer les acteurs sociaux et éducatifs, qui sont souvent les premiers à détecter une situation de vulnérabilité. Des formations spécifiques peuvent être proposées à ces professionnels pour leur permettre de repérer les aidants et de les orienter vers les ressources et les aides existantes.

Des mesures concrètes pour soutenir les aidants :

Face à ces enjeux, plusieurs mesures ont été mises en place pour soutenir les aidants. Les personnes aidantes peuvent ainsi bénéficier du congé de proche aidant, qui leur permet de s’absenter du travail pendant une certaine période pour s’occuper de leur proche dépendant. Des aides financières sont également disponibles pour les aidants qui remplissent certaines conditions.

Des services de répit peuvent aussi être proposés, pour permettre à l’aidant de souffler et de prendre du temps pour lui. Ces services peuvent prendre la forme de structures d’accueil temporaire pour la personne aidée, ou de services à domicile qui prennent le relais pour quelques heures ou quelques jours.

Des associations d’aide aux aidants sont également présentes pour apporter soutien et conseils. Elles peuvent offrir des formations pour aider l’aidant à mieux comprendre la maladie de son proche, à gérer le stress ou à améliorer sa communication avec le proche aidé.

Vers une reconnaissance sociétale du rôle des aidants :

Au-delà des mesures concrètes, il est essentiel de valoriser le rôle des aidants dans notre société. Leur dévouement et leur engagement sont précieux, mais ils ne doivent pas se faire au détriment de leur propre santé. Il est temps de sortir de l’ombre le syndrome de l’aidant, de reconnaître le sacrifice de ces millions de personnes qui, chaque jour, se battent pour aider un proche en difficulté. Leur combat silencieux mérite d’être entendu et soutenu.